Bien souvent les "nouveaux" trouvent une atmosphère spéciale qui n'a ni queue ni tête et pas de structure.
Les premiers instants sont habités par du "qu'est-ce que je fous là ?"
Seule l'amitié est au rendez-vous avec un je-ne-sais-quoi en toile de fond, je-ne-sais-quoi que l'on perçoit à quelques petits indices révélateurs.
La présence de nombreux "anciens"...
On les reconnait car ils sont souvent couverts de badges, ont des machines comme des destriers qu'eux seuls savent conduire, ont été au bout du monde et...possèdent quelques rides. Ils sourient à tous.
Que viennent-ils faire là, pourquoi reviennent-ils dans le froid, quel est l'essence de leurs partages ?
Si on les écoute, ils racontent des blagues, rient de bêtises qui arrivent dans leurs voyages, etc...mais
il y a plus.
Ce plus, on le perçoit en restant avec eux un moment, en les écoutant un peu tard le soir ou le matin au café : ce sont des contacts de cœur et assez individuels. Il faut passer une sorte de porte dont la première est le respect.
Alors le monde des hivernales s'ouvre.
Il faut prendre le temps de les écouter car même s'ils résument, ils ne peuvent pas raconter en 5 mn trente années de vie. Et il faut aussi qu'ils aient envie de vous parler. Poser des question,
partager un verre qu'on leur apporte.
Venir les mains vide est une grosse erreur.
Car derrière ces Motards de tradition, il existe toute une filiation. Une filiation de voyages, de découvertes, d'univers simples et sans argent.
Des années de routes, des milliers de kilomètres, des pépins dont on n'a pas idée.
Ne pas évoquer une crevaison, une bougie qui crame, un aller simple au tapis...ils vont vous regarder avec des yeux doux.
Nan, eux c'est Dédé qui s'est tué en descendant l'Ardèche ou autre, c'est Yan qui a flambé sa bécane en Finlande, c'est la femme d'un des leurs qui est partie lorsqu'il était en voyage, c'est Gillou qui est en fauteuil suite à un accident...c'est du fort, du très solide, du on ne s'imagine pas.
Lorsqu'on se rend en hivernale ou dans des concentrations historiques, on rencontre ce monde.
Mais il n'y a pas de prosélytisme et les portes ne sont pas fermées. Il suffit de les pousser mais savoir déposer cette sorte de "droit d'entrée" par le simple souhait de suivre cette Tradition
sur la route.
Les erreurs et les portes fermées : "moi je...", tendre un verre vide sans rien apporter, etc...ils savent qui sont les rigolos et ne s'en occupent même pas : ces derniers peuvent venir...de toutes manière ce sera comme eau et huile, du non- miscible.
Ils ont un savoir-vivre et un bon sens très au dessus de nos énarques...les pics assiettes sont vites reconnus et virés sans violence, par totale opacité en devenant invisibles. C'est pas la peine de leur taper dans le dos car ils savent au premier geste ce que cela veut dire : je te tape dans le dos, c'est que je vais te demander quelque chose et que je risque de t'enculer après. Ils sont aguerris à tout ça.
On partage avec les anciens. Quand ils sont assis et gelés, s'ils se lèvent, on leur donne discrètement la main et une main ferme et rapide, en s'effaçant.
On regarde leurs machines. On écoute, on apprend.
Ils savent reconnaitre un motard simple qui viendra tâter l'aventure avec eux.
...on apprend à partager les longs moments de silence dans lesquels l'absence de parole est plus puissante que le bavardage. On se tait lorsqu'ils parlent...
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