Est-Motorcycles a écrit : 27 févr. 2023, 18:26
+1 le scarabée m'intrigue beaucoup...Tu as des renseignements sur cette question stp?
J'ai trouvé ce document concernant sa découverte :
Égypte-actualités
8 Januari 2020 ·
Karnak, 1907-1908 : un scarabée géant sort des sables
En 1907-1908, Georges Legrain, qui est à la tête de la "Direction des travaux de Karnak" (ancêtre du CFEETK*), y entreprend sa douzième "mission". Elle sera notamment couronnée par une magnifique découverte, faite dans l'enceinte du temple d'Amon.
Dans son rapport "Travaux à Karnak en 1907-1908", il la relate ainsi : "Selon les ordres de M. Maspero, nous avons cette année déblayé le monument de Taharqa au sud du Lac Sacré. Ce travail ne nous a rien fait connaître de nouveau, mais par contre, en poussant le déblaiement plus au sud, nous avons trouvé un monument important entre l'angle sud-ouest du monument de Taharqa et le Lac Sacré. C'est un énorme scarabée long de plus d'un mètre, sculpté à même un socle de granit haut de deux mètres qu'il surmonte. Un véritable chef-d'œuvre. L'animal sacré est tourné vers le sud. Le socle a été aplani de ce côté et orné d'une grande et belle stèle…"
Eugène-Melchior de Vogüé, écrivain et journaliste, est à Louxor au moment de la découverte. Il en fera ainsi le passionnant récit dans le Figaro du 3-6-1908 : "Nous passions à l'angle nord-ouest du Lac Sacré pour gagner une autre partie de l'enceinte. Une équipe de bambins fourmiliers grattait par là. "Granit!" crie l'un d'eux. Une pierre dure a résonné sous sa pioche. Une section de colonne en granit rose de Syène montre bientôt son orbe rugueux ; le fût a été brisé à cette place… Le tronçon de colonne est dégagé jusqu'à sa base quadrangulaire, une inscription hiéroglyphique apparaît sur une face ravalée. "Bon, cela!" s'écrie Legrain après une lecture sommaire des premiers signes. Les gamins lui signalent un autre fragment de pierre dont l'arête affleure la première heure… Un second bloc, un simple fragment de la colonne brisée est extrait… puis… sur la face enfouie du tronçon, un énorme scarabée, sculpté en plein bloc, à même le dur granit rosé, dans toute la largeur du champ. C'est le plus grand exemplaire qu'on ait jamais trouvé de l'emblème de résurrection cher aux anciens Égyptiens. Il mesure un mètre de longueur sur cinquante centimètres de largeur, le plus remarquable par la beauté du travail, le seul qui se soit présenté dans ces conditions insolites. D'autres éclats de la colonne, recueillis aux alentours, s'adaptaient parfaitement aux cassures et complétaient l'inscription sous la tête du scarabée... La colonne tronquée surmontée de son mystérieux scarabée était devenue la grande affaire des quelques Français réunis à Louxor, l'émotion, l'obsession qui les attirait comme un aimant."
Et, cette attirance pour le coléoptère, si elle questionne, ne se démentira pas…
Ainsi, une vingtaine d'années plus tard, dans son ouvrage "Thèbes, Karnak et Louxor", Maurice Pillet le présente ainsi : "Divers vestiges antiques demeurent encore auprès du lac sacré. A son angle nord-ouest, un piédestal arrondi supporte un magnifique scarabée géant, taillé dans le granit sur l’ordre d’Aménophis III, qui le dédia au dieu Atoum Khefré. L’insecte sacré regarde le lac et représente le symbole du renouvellement continu de la vie, donc d'éternité. Ce pauvre coléoptère, noir, lourdaud et maladroit, que l’on voit par tous pays traîner lentement son corps arrondi dans la poussière des chemins, eut une glorieuse destinée dans l’Égypte antique. Par suite d’un jeu de mots sur son nom qui signifie exister, être, ou plus simplement par suite d’une interprétation curieuse de l’une de ses habitudes : celle de rouler, dans le trou où sont déposés ses œufs, des boulettes de fumier dont ses larves naissances se nourriront, le bousier nécrophore devint par excellence le symbole de la résurrection…"
Après la découverte, Georges Legrain étudia longuement les inscriptions, ainsi que la stèle, livrant ensuite ces intéressantes réflexions : "La mention d'un temple de Khoprî-Kbopiremto (?) est fort importante à l'époque d'Amenothès III et marque une des étapes qui ont précédé la révolution atonienne. J'ai pensé et je pense encore que le scarabée de Karnak n'était pas seul jadis et avait au moins un vis-à-vis, formant ainsi une sorte d'allée de scarabées sacrés devant une chapelle héliopolitaine."
Une autre question se pose également : ce scarabée, réalisé par Aménophis III, était-il vraiment, à l'origine, à Karnak ? Voici l'approche exposée dans "Joyful in Thebes: Egyptological Studies in Honor of Betsy M. Bryan", publié par Kathlyn M. Cooney et Richard Jasnow : "Il était probablement à Kom el-Hitan, mais plus tard, il a été déplacé vers le coin nord-ouest du Lac Sacré, probablement par Taharqa".
A Kom el-Hitan, sur la rive ouest de Thèbes, s'élevait "l'Amenophium", le temple de millions d'années d'Amenophis III qui le décrivit ainsi : "Ce temple est entièrement revêtu d'or, son pavement est orné d'argent, toutes ses portes sont en électrum, construit très large, et très grand et parfait à jamais"…
Remonté et restauré, le scarabée resta à l'endroit de sa découverte pendant de nombreuses années. Puis, en 2009, il a été déplacé de quelques mètres, certainement, afin de permettre aux nombreux touristes qui en font sept fois le tour, à titre de porte-bonheur, d'avoir un espace suffisant pour se déplacer.
marie grillot
* Centre Franco-Égyptien d'Étude des Temples de Karnak
Légende :
Scarabée de granit rose au nom d'Aménophis III découvert en 1907-1908 par Georges Legrain, près du monument de Taharqa au sud du Lac Sacré[/i]