LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

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Helga
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Helga »

Nous recevons de nombreux messages en MP qui soutiennent et encouragent Dan dans ses écrits. Je vous remercie personnellement pour ces messages qui à la fois donnent signe de vie et en même temps respectent le fil de ce reportage si particulier qui est très lu - environ 100 visites par jour...Bravo.
Mais le plus curieux, c'est que ces messages ne proviennent pas du tout de personnes de notre entourage, mais de personnes que nous n'avons pas coutume de lire.
C'est formidable, merci beaucoup.
Est-Motorcycles
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Est-Motorcycles »

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Babouchka file nez au vent, environnée de sa sonorité de Spitfire...et Laponette suit gaillardement le rythme en trottinant, me faisant penser à une fillette heureuse sautillant derrière soi alors qu'on la tient par la main...
Les coups de pistons incessants sont tout aussi puissants que la droiture infaillible de la route qui, malheureusement, finira en virage ! Car c'est cette droiture qui est l'objet rituel de la transe lapone, entre autres, elle est comme une piste de décollage d'engin spatial.
Incontestablement cette jeune maman suédoise m'avait d'une manière involontaire sans doute lancée un message : à cette hauteur géographique dans le pays - un peu au dessus du 64°parallèle, vers Storuman - , j'arrivais au premier sas marquant la frontière réelle entre le monde saame et l'Europe.
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Exactement identique aux paliers de décompression en plongée, ce sas est vital car il permet de ne pas couper les amarres d'un seul coup : je n'imagine pas une seule seconde ce que deviendrait un embarquement direct sur un vol pour Paris par exemple, et de m'y retrouver dans deux heures ! Ouch, l'horreur...
Car je ne roulais pas pour "rentrer", il n'y a pas de retour lors de ces voyages. L'idée de retour, c'est déjà avoir la tête plantée dans l'arrivée, alors qu'on est loin d'y être ...et de plus, lorsqu'on sait que l'on ne rentre pas comme on est parti, en fait on ne revient pas car on revient vraiment autre. Celui qui ne revient pas autre n'est pas parti : il n'a rien lâché de lui, il est parti seulement avec lui en fermant bien portes et fenêtres afin que rien n'entre et ne sorte. En fait il ramène des films qu'il montrera mais dans lesquels celui qui y sera le même que celui qui est parti.

Un ami m'avait envoyé un long message :
...On l’avait attendu ce départ, les jours presque figés, le compte à rebours avant ce petit matin, celui qui devait nous emmener loin. Les secondes interminables, le temps suspendu.
Le temps qui, dès les premières heures du voyage, a repris sa course, a passé la seconde, les jours qui se sont succédé, puis les semaines, de plus en plus vite, avec l’empressement ridicule des moments agréables, ces instants si rapides qu’on est incapable de les conjuguer au présent.
On est à peine parti que déjà il faut rentrer.
C’est le point commun de tous les voyages. Quel que soit le trajet, quelle que soit la distance, à un moment il faut faire la route dans l’autre sens. Pour une escale, pour des vacances ou pour s’installer, à un moment il faut rentrer...


Je m'insurge.
Je m'insurge parce que si je rentre dans cet état d'esprit je ne ramène rien, rien d'autre que la copie du même qui est parti et qui ne rapporte rien; c'est être avare de cadeaux vrais, pensant que soi suffit, c'est offrir à ceux qui sont restés la même gueule, les mêmes idées, le même égoïsme. Vite rechercher ses mêmes pantoufles...
Or celui qui est parti l'a pu grâce à ceux qui sont restés. Il doit donc ramener dans ses bagages et dans tout son être les plus beaux cadeaux, sa plus belle tronche, un autre vent, d'autres odeurs nouvelles, du manger d'impressions et en vrai. Lorsque les sacs s'ouvrent des myriades d'étoiles resplendissantes en jaillissent, même la moto a changé ! Le chien ne s'y trompe pas et il observe de ses grands yeux ouverts cet autre qui revient et duquel il sera curieux. Il en est paralysé.
Le budget cadeaux lors de mes retrouvailles représente un bon quart du budget global de voyage, et je préfère raccourcir ma route que d'effacer l'image d'un visage qui me vient sur la route lorsque je découvre un bel objet en me disant "c'est cher, je ne peux pas sans toucher à mon programme". He bien j'y touche, à ma route. D'abord ces présents et ensuite ma vie, parce que mon bonheur devant les yeux qui s'étincellent aux ouvertures des paquets font partie de ma joie du Loin : je vais les chercher exprès, je leur rapporte ces morceaux d'inouï, de sauvage et de mystères. Le chien court partout, il sent les papiers, chaque objet jusqu'au moment où je lui sors SON cadeau qui est un morceau de viande de renne séché. Il le prend délicatement et retrouve instantanément sa filiation de loup. La queue basse, les yeux sombres, il se retire comme un fauve et grognant sans se retourner et en se cachant.
Bien entendu je le lui donne dehors, je le cache et il le cherche comme un fou : il sait très bien que c'est pour lui.
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Le temps devenait bien sombre...
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...pas de pluie pourtant...
Mais oui, la nuit refaisait son apparition ! Comme c'était étrange, la nuit qui venait... Cela m'apportait un brin de curieuse tristesse mais je me dis de suite qu'après le bon gâteau s'ensuit souvent son absence et qu'à chaque moment exceptionnel s'ensuivra une forme de "retour à la normal".
C'était bien la présence du sas...et je décidais donc de (re)observer la nuit qui vient.
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Laponette installée et auvent, casse-croûte je regarde l'heure : 23 heures.
Curieux, je vomis un peu plus loin dans les bois juste avant de manger, alors que j'allais parfaitement bien et que je vomis sans douleur, comme si c'était une purge.
Ah oui, 23 heures et la nuit tombe, c'est normal Dan.
Je me plantai au bord de l'eau, m'allongeai pour regarder la nuit qui tombe...
Avec des petits cailloux je jouais dans l'eau comme un gosse en chantonnant, j'attendais l'étoffe des songes arriver, étoffe que j'avais égarée lors des journées "sans nuits" dans lesquelles les sommeils étaient tous "On"/"Off".
Et justement, commençant à être égaré dans mes songes, voici que ce petit compagnon me parla ...
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Et coin-coin ceci, et coin-coin cela, je devais être sur son territoire et il m'enguirlandait certainement.
Comment allais-je lui répondre ?
Mais oui, bien sûr, un canard ça se flingue et ça se mange ! Car je suis tellement supérieur à cet animal, JE l'observe, JE le domine, JE le cadre, JE suis con.
L'image de la chamane saame revient...je sens ses mains sur ma nuque...puis les yeux du renne percent le brouillard de ma conscience...
Alors je me mis à lui parler, comme au renne, comme mon égal.
Plus que les mots, il comprend mes émotions, exprimées à travers mes gestes doux ou mes intonations. Y compris celles que j'efforce de cacher - la crainte de cette première nuit. Je suis certain que par mon comportement – agitation, prostration… –, c’est mon propre non-dit émotionnel que l’animal exprime. Et de l’émotion, il y en a à revendre dans cette forme de communication. Je m’adresse à lui, animal, avec toute l’affection dont on aimerait être soi-même l’objet, dans un premier temps, et il le sent ! Ses coin-coin se calment et il se met à pousser quelques petits gémissements doux. Je me rendis compte que de lui parler avec douceur de tout mon être revient à lui attribuer un statut d’ami, d’égal, voire de « double de soi ». De fait, se confier à lui permet de “lâcher” ses propres demandes affectives, à commencer par celle d’être écouté intégralement, fidèlement… En un mot : d’être aimé idéalement, ce qui rend compte « d’une persistance de l’infantile » en nous - ce que je cherchais et ce que la chamane m'avait donné pour cible...
Je m'endormis, la nuit était là.
http://www.est-motorcycles.fr/
Une ex-petite vie de concessionnaire URAL en Auvergne et sa fin.
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J'ai survécu à des choses bien difficiles jusqu'à présent. Ce n'était pas de la chance, mais de la force...Je dispose de codes solides très simples qui ne courent pas les rues...
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ilederiou

Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par ilederiou »

Est-Motorcycles a écrit :.."je n'imagine pas une seule seconde ce que deviendrait un embarquement direct sur un vol pour Paris par exemple, et de m'y retrouver dans deux heures ! Ouch, l'horreur...
Car je ne roulais pas pour "rentrer", il n'y a pas de retour lors de ces voyages. L'idée de retour, c'est déjà avoir la tête plantée dans l'arrivée, alors qu'on est loin d'y être ...et de plus, lorsqu'on sait que l'on ne rentre pas comme on est parti, en fait on ne revient pas car on revient vraiment autre. Celui qui ne revient pas autre n'est pas parti : il n'a rien lâché de lui, il est parti seulement avec lui en fermant bien portes et fenêtres afin que rien n'entre et ne sorte. En fait il ramène des films qu'il montrera mais dans lesquels celui qui y sera le même que celui qui est parti..."
Comme tu as bien exprimé ce que j'ai ressenti en Juin dernier.

Merci Dan
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Cathy »

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..."Et coin-coin ceci, et coin-coin cela, je devais être sur son territoire et il m'enguirlandait certainement.
Comment allais-je lui répondre ?
Mais oui, bien sûr, un canard ça se flingue et ça se mange ! Car je suis tellement supérieur à cet animal, JE l'observe, JE le domine, JE le cadre, JE suis con.
L'image de la chamane saame revient...je sens ses mains sur ma nuque...puis les yeux du renne percent le brouillard de ma conscience...
Alors je me mis à lui parler, comme au renne, comme mon égal.
Plus que les mots, il comprend mes émotions, exprimées à travers mes gestes doux ou mes intonations. Y compris celles que j'efforce de cacher - la crainte de cette première nuit. Je suis certain que par mon comportement – agitation, prostration… –, c’est mon propre non-dit émotionnel que l’animal exprime. Et de l’émotion, il y en a à revendre dans cette forme de communication. Je m’adresse à lui, animal, avec toute l’affection dont on aimerait être soi-même l’objet, dans un premier temps, et il le sent ! Ses coin-coin se calment et il se met à pousser quelques petits gémissements doux. Je me rendis compte que de lui parler avec douceur de tout mon être revient à lui attribuer un statut d’ami, d’égal, voire de « double de soi ». De fait, se confier à lui permet de “lâcher” ses propres demandes affectives, à commencer par celle d’être écouté intégralement, fidèlement… En un mot : d’être aimé idéalement, ce qui rend compte « d’une persistance de l’infantile » en nous - ce que je cherchais et ce que la chamane m'avait donné pour cible...
Je m'endormis, la nuit était là..."


Un bien joli canard comme guide ...
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Est-Motorcycles »

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Au petit matin j'étais bien, plus que jamais toujours décidé à descendre au centre de la Suède.
Au départ de cette aventure saame j'étais comme une argile sèche et craquelée, morcelée par l'absence de ce que je n'avais pas encore vécu.
Mais maintenant je me sentais comme une bonne glaise abreuvée d'eau, bien malléable et sur laquelle les jours avaient imprimés et marqués leurs messages.
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Le coin-coin de la veille hurlait en me voyant passer le lendemain - c'est le même j'en suis certain, il voulait me dire au revoir...
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Je le sentais au travers de petits détails qui, auparavant, m'auraient pris la tête en me fermant complètement dans une glue d'angoisses idiotes.
Par exemple, je n'avais plus de fric liquide. En fait comme un imbécile j'avais pris des sous en numéraire dans une pochette afin de ne pas devoir me servir de ma CB. La CB m'emmerde en effet :
1 - ils savent tout ce que vous dépensez et à quoi, on entre dans les études de marketing statistique et tu te retrouves avec ton portable blindé de pubs ou encore sur tes mails. Franchement j'ai envie de brûler cette dictature du capitalisme simplement parce que je ne l'ai pas choisie.
2 - je me suis retrouvé plusieurs fois coincé devant un putain de distributeur qui avait bouffé ma carte et qui ne comprenait rien, bien sûr le soir après la fermeture des banques, et de devoir dormir sur place pour récupérer cette s.... de CB le lendemain. Heueueu, sur 6 voyages cela m'est arrivé 5 fois tout de même ! Donc dorénavant dans ma tête, j'embarque du liquide. Juré-craché.
J'avais des Euros, des NOK, des SEK et des ZLOTY...mais il me manquait des SEK puisque la providence avait décidée que je continue en Suède.
(Petite parenthèse : des imbéciles feraient bien de s'interroger sur le devenir d'une Europe avec 36 monnaies. Pour vouloir cela, les gars ne sortent pas de leur village. Evoluons un peu, ceux qui voyagent et qui sortent de leur pays savent de quoi je parle.)
L'auvergnat basique que j'étais légalement ici aurait dû obéir à la logique financière : plus de SEK, pas de change et tu ne changes pas ton programme prévu au départ, le système te contraint de rester collé à ta feuille de route prévue et planifiée car tu ne dois pas sortir du plan ! En sortant du plan tu échappes à la manipulation markéting : ils ne peuvent plus prévoir à 100% ce que tu devras choisir et cela, he bien ça les rend malade.Tu vas te faire voir chez plumeau si par le plus grands des hasards se présentait un imprévu. Tu ne peux pas : obligé de te servir de ta CB ou de tout planifier.
Or tout ici est devenu imprévu !
Je dus conséquemment rejoindre une grande ville dans laquelle se trouverait une banque qui change : je préférais ce détour plutôt que de coller au programme obligé de la planification.
Hop, sitôt pensé sitôt trouvé, derrière ce pont résidait la banque :
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...et pour rassurer les foules, il y a plein de choses douces...
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Tu dois être bien, rester dans la lunette : il y a même des gonfleurs pour les pneus de vélos à tous les coins de rue !
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Hop, les sous sont au 3° étage, je prends le hissar pour me monter - l'ascenseur, là je me suis marré quand même un peu...hissar...Oooo hisse ! :D 8)
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Je regarde par la fenêtre, tient, des flics... les seuls que j'aurai vu durant ces 10000 kilomètres - sauf en France hein, où j'en avais déjà rencontré en "rentrant" une bonne dizaine après la frontière strasbourgeoise et rien que sur 25 kms...
Ah, cette France libérale, révolutionnaire...mais pleine de flics...
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Je ressors avec mes sous bien décidé à fuir ! Je croise ce truc sur une poubelle : il n'y a que dans les villes qu'on peut trouver ces conneries.
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Au taquet je reprends la route pour trouver un magnifique camping - magnifique = simple et familial -
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Je pose Laponette et en allant au toilettes j'entends des gosses rire, rire à s'étouffer... je les trouve qui s'amusent comme des fous !
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C'est bon, je peux continuer l'errance et le silence...c'est-à-dire sans autre but que le voyage lui-même en offrant ma glaise d'une bonne plasticité aux impressions de l'imprévu...

...
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Cathy »

Un immense Merci, de nous faire partager avec talent, toutes ces réflexions autour de ce voyage intérieur, de la façon de percevoir le monde que l'on chemine différemment dans la simplicité, porté par les éléments, guidé par les animaux qui nous entourent, réceptif aux êtres qui croisent notre route, porté par le vent !
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Simone
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Simone »

C'est parfois si simple la vie: un rire pour illuminer la vie des autres, un arrêt pour les voir et ne pas les transpercer de notre absence. Le combat d'aujourd'hui s'arrête à ces "petites choses" décrites ici, c'est tellement désarment, mais tellement vital. Ne pas les comprendre, revient à laisser le "monstre" nous étouffé sans un cri...Dom :D
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Simone »

Ce voyage, nous a bouleversé, par la beauté des paysages et aussi par toutes les impressions ressenties. Nous avons pris des chemins différents pour sillonner le grand Nord, mais il nous importait de rester en contact... Ce récit va au delà de la description, c'est celui aussi d'un voyage intérieur, révélant en même temps à nous-mêmes le chemin encore à parcourir...
Et nous restons silencieux, devant l'écran. Présents, mais silencieux, décontenancés et paralysés par le pouvoir des mots. Ce récit, permet de découvrir une autre dimension du voyage... Et nous ne diront jamais assez : MERCI. Sim
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Africanpostman »

Bon, Dan, à part te dire merci , je reste bouche bée ! :)
Quel beau voyage et quelles sensations ça a du être !
Merci pour ce récit passionné et passionnant , un régal !

Amitiés

Dominique
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Marip »

Je ne peux que dire merci pour ces beautés et ces impressions subtiles.
c'est pas parcequ'ils disent tous la même chose qu'ils ont raison
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Est-Motorcycles »

Merci pour ces témoignages...
C'était bien beau de rouler, mais la machine devait recevoir ses douceurs.
Hop, changement de pneus AR, d'autant que la petite différence qui se marque entre Gogo et moi - minime - tient au fait qu'en restant dans le même coin je me déplaçais beaucoup alentours...
Donc comme d'hab. une boîte locale spécialiste dans les fournitures de pneus pour voitures...
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Des champions les gars, du beau travail avec un outillage pro : il a suffit que je leur démonte la roue et voilà. Equilibrage et tout...je pouvais repartir pour 7000 bornes !
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Babouchka était chaussée.
Et si je ne parle pas souvent des soins que je lui apportais, c'est qu'elle m'a donné une tranquillité inouïe. Niveaux d'huile, vidanges, pneus et puis c'est tout. Quelle fantastique machine pourtant très sollicitée dans des conditions assez extrêmes.
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Je filais droit sur Falun qui reste un passage obligé car mythique, tout comme Kiruna.
Lorsque nous partons quelque part, on envisage souvent les objectifs de voyages comme des "comment" et des "quoi".
Mais le "pourquoi" ?...
Avec Falun la motivation était forte car voici des années de grands personnages métallurgistes m'avaient parlé de ces lieux que je traversais enfin, et qui n'avaient pas changé depuis leur époque...
L'apprentissage des kilomètres antérieurs de l'errance m'appris à retrouver leurs traces, traces que je n'aurais pu retrouver avec du déterminisme, des plans et des guides. Car voici 50 ans il n'existait pas de guides...et je connus ces être exceptionnels enfant/ado.
La motivation n'était donc pas superficielle car si elle l'eut été, l'engagement dans cette direction ne se serait pas vécu à fond - comme avec les saamis.
Une motivation superficielle engendre la manie d'aller trop vite : on agit pour se distraire, par caprice ou pour donner une image de soi qui servira. Dans ce cas les projets exceptionnels n'aboutissent jamais.
Retrouver la trace de mes "vieux" était donc un défi du même ordre que de trouver les saamis, car quelle leçon ils m'ont donné !
Jamais je n'aurais retrouvé leurs traces sans cette étape au préalable. Je serais resté dans mes schémas, dans mes habitudes et tout ce que j'ai décrit précédemment.
Je comprenais que l'aventure entendue comme une philosophie de vie constitue dorénavant pour moi le moyen le plus intense, le plus passionnant, d'expérimenter la vie.
Tous mes parcours seront sous-tendus par cette attitude intérieure.

Me rendre a Falun, photographier la ville et rentrer au camping dormir est une chose, mais retrouver la trace de mes Anciens en était une autre car j'étais à nouveau devant ce désert de plans en me lançant un défi non pas comme un objectif à atteindre, mais comme une surface de mouvements, d'actions.
Je n'allais pas vers Falun : je souhaitais atteindre Falun comme mon terrain de jeu d'enfants et de me mouvoir sur ce terrain jusqu'à ce que je retrouve des traces...
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Dans mes expériences de vie je recherche un chemin intérieur qui me permet d'évoluer (non pas de grandir, mais de ne pas rester vissé sur le point d'un objectif - et donc de m'auto hypnotiser), qui me permet d'apprendre à aimer et à multiplier le temps afin d'harmoniser ma cohérence.
Il n'y a pas là une question religieuse car voici bien longtemps que les voies non religieuses orientent mes réflexions et aujourd'hui c'est difficile d'être "athée", disons plus précisément libre penseurs, humaniste avec quelques traces panthéistes.
L'arrivée à Falun ne fut donc pas du tout placée sous le sceau de la "visite". Je cherchais comme le petit Poucet quelques cailloux...
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Houlaaa, ça a saigné ici aussi, comme chez nous, comme partout...Ah, ces "religions"...
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Connaissant mes "vieux", je savais déjà que ces cailloux-petits trésors ne se trouvaient pas par là...
Je flânais dans la ville le nez en l'air, regardant les gens et surtout ce qu'ils ne regardaient plus.
...et voici qu'un bronze insignifiant ne retenait aucun regard, il était placé là un peu n'importe comment et toutes les personnes passant hâtivement devant lui ne le voyaient pas !
Qui est ce personnage, premier cailloux ? :shock:
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Tient...c'est Selma Lagerlöf, écrivain émérite :
http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=& ... nJckw2ogEw
Je cherchai immédiatement la bibliothèque municipale, sachant que les suédois font ça très bien pour tous :
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...et demandais le livre le plus marquant de cette formidable femme.
Incontestablement la vraie bibliothécaire pas en CCD ni avec piercing et dénantie de la manie automatique du rap, voyant que j'étais français, me tendit le fantastique ouvrage "Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède".
Mon cœur ne fit qu'un bond avec les personnes qui étaient dedans !
Nils Holgersson, un petit garçon qui ne pense qu'à dormir, voyager, partir à l'aventure, manger et jouer de mauvais tours, vit dans la ferme de ses parents en Scanie, dans le sud du pays. Il aime particulièrement persécuter les animaux, telles que les oies. Un dimanche où ses parents l'ont laissé seul à la maison, il rencontre un "tomte" qui, pour le punir, le rétrécit et lui donne la capacité de parler avec les animaux. Au même moment, un jars de la ferme décide d'accompagner un groupe d'oies sauvages dirigé par "Akka" de Kebnekaise dans leur migration pour les "fjells". Dans sa tentative pour le retenir, Nils s'envole avec lui.
Il traverse ainsi la Suède, visitant ses provinces. Le roman, qui compte cinquante-cinq chapitres, est l'occasion de découvrir les caractéristiques naturelles, les ressources économiques et les contes et légendes des lieux qu'il traverse.


Je parcourus quelques passages qui correspondaient exactement à ce que j'avais déjà vécu en Suède et qui étaient corroborés par mon cœur.
Un papi - et quel papi ! - continua à m'expliquer que les enfants suédois sont tous nourris des écrits de Selma Lagerlöf et ses mots étaient traduits par une étudiante sachant parler français, qui passait par là...
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..et je posais naturellement la question au Dab : où pouvaient se rendre les chercheurs de vérité qui se rendaient à Falun voici 50 ans ?
- Go see the director of the Museum of Falun, not mine there, right next door. His name is ... (je le garde pour moi)

...à suivre...
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Cathy »

par Est-Motorcycles » 07 Oct 2014, 19:47

..."Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède".
Mon cœur ne fit qu'un bond avec les personnes qui étaient dedans !
Nils Holgersson, un petit garçon qui ne pense qu'à dormir, voyager, partir à l'aventure, manger et jouer de mauvais tours, vit dans la ferme de ses parents en Scanie, dans le sud du pays. Il aime particulièrement persécuter les animaux, telles que les oies. Un dimanche où ses parents l'ont laissé seul à la maison, il rencontre un "tomte" qui, pour le punir, le rétrécit et lui donne la capacité de parler avec les animaux. Au même moment, un jars de la ferme décide d'accompagner un groupe d'oies sauvages dirigé par "Akka" de Kebnekaise dans leur migration pour les "fjells". Dans sa tentative pour le retenir, Nils s'envole avec lui.
Il traverse ainsi la Suède, visitant ses provinces. Le roman, qui compte cinquante-cinq chapitres, est l'occasion de découvrir les caractéristiques naturelles, les ressources économiques et les contes et légendes des lieux qu'il traverse.
..."

http://www.youtube.com/watch?v=kPWZvL2mHC8

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Une très belle histoire ...
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gecko
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Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par gecko »

Merci,a vous deux.....je l attendais avec impatience en regardant "Salut les petits loups !."

petit film sovietique de 1955

http://www.dailymotion.com/video/xrel68 ... shortfilms
Ural 6½ et ¾ L ♀ Thørep "Черная овца"
EM/JPA powered
Запад едидт с Востоком
Урал, отличный генератор положительных эмоций!
...Custodes...
Bardevitch

Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Bardevitch »

Les récits de Dan, qui d'année en année approchent progressivement de la mystique, ne peuvent pas être compris de nous dans la totalité de ce qu'ils portent, trop faibles supports qu'ils sont d'une pensée habitée d'un évident ailleurs. Nos commentaires admiratifs (que pourraient-ils être d'autre ?) ne nous satisfont pas malgré tout notre désir de les mettre à la hauteur de l'aventure. Peut-être, à notre différence, notre ami a-t-il exorcisé ce grand malheur de l'époque moderne qu'est le refus de l'invisible.
Dan-le-dentard

Re: LAPPLAND : ...une anatomie de l'errance et du silence...

Message par Dan-le-dentard »

Bardevitch a écrit :Les récits de Dan, qui d'année en année approchent progressivement de la mystique, ne peuvent pas être compris de nous dans la totalité de ce qu'ils portent, trop faibles supports qu'ils sont d'une pensée habitée d'un évident ailleurs. Nos commentaires admiratifs (que pourraient-ils être d'autre ?) ne nous satisfont pas malgré tout notre désir de les mettre à la hauteur de l'aventure. Peut-être, à notre différence, notre ami a-t-il exorcisé ce grand malheur de l'époque moderne qu'est le refus de l'invisible.
Voilà pourquoi j'ai décidé de ne plus rien dire sur le sujet, en attendant d'en parler avec lui devant un verre (c'est moi qui écris ça :shock: : il m'a complètement retourné le cerveau, le chaman !) . Sauf que la prochaine fois, y aura du détronchage dans l'air et c'est moi qui serai du bon côté de l'instrument ... 8)
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