Très intéressant mon ami et assez unique, je te remercie beaucoup. Quelle chance tu as eu de cheminer ainsi : mais enfin, tu l'a méritée...Marip a écrit : ↑17 janv. 2024, 09:14Merci pour ce récit magnifique !uraleur a écrit : ↑17 janv. 2024, 06:27Mais c'est bien aussi de ne pas tout planifier ! ...
Sans préparation, nul doute que l'on passe à côté d'importants sites touristiques, historiques ..., mais l'on gagne souvent en rencontres spontanées, essentielles.
J'ai quand même en mémoire, même si dissipés dans le brouillard des années, quelques reportages, lus ou vus, parlant d'un « Altaï paléolithique » berceau de la civilisation. Lieu de nombreuses découvertes de présences humaines vieilles de plusieurs centaines de milliers d'années.
Les trois premières heures passent aux travers de cultures, sur un terrain relativement plat. A Biïsk, petite ville au pieds des Monts Altaï, c'est la rencontre de deux rivières (Biia et Katoun) qui engendrent le fleuve Ob. Étrangement ce fleuve n'a pas de source propre ; les géographes ont peut-être estimé que 4000 km de long c'était suffisant, nul besoin de devancer Léna, le plus long fleuve russe avec ses 4400km. Ou peut-être que l'âme russe aura vu la naissance du fleuve Ob comme le résultat d'une histoire d'amour dans la rencontre de Biia et Katoun !
Pour l'heure c'est le temps de remonter la vallée de la rivière Katoun et de découvrir l'Altaï.
Altaï, montagne dorée dans la langue des conquérants turkman. Plus que la couleur dorée des alpages je crois qu'il s'agit du sous-sol local qui regorge de minéraux dont l'or. Avec ses 2000 km de long et 600 km de large, l'Altaï s'étend sur quatre pays. La Russie, La Mongolie à l'est, la Chine au sud et le Kazakhstan à l'ouest. Ces 4 pays se rejoignent au centre du massif. Un point culminant à plus de 4500m d'altitude et plus de 600 km2 de glacier. Ici point de ski d'été sur glacier, amateurs de nature préservée et sauvage à vos marques !
Et les randonneurs russes, principalement de Sibérie, ne s'y trompent pas. En témoignent les maisonnettes en bois des camps de vacances que j'aperçois au travers des arbres qui longent le Katoun. Ici la route suis sagement le cours d'eau, peu de voitures, légère montée, environnement verdoyant, l'Ural ronronne de bonheur, un moment de partage entre l'homme et la machine !
La vallée se resserre, la pente s'incline un peu plus et à Ust'-Sema la route quitte la vallée du Katoun pour s'élever jusqu'au col Seminskii à 1717 m en suivant la petite rivière Sema. Il est possible de continuer le long du Katoun même si cette voie est sans issue elle permet de suivre le cours d'eau jusqu'à des gorges et au passage de visiter le village de Tchemal et son icône miraculeuse !
Au col, la pause s'impose. Baraques de souvenirs, miel, pignons de pins, petits cafés restaurants. L'endroit est venté, mais un de ces vents frais qui vous bousculent et vous font vous sentir en vie. Casse-croute sommaire fait de pain, sardines et fromage, tentative de communications avec les touristes intrigués par l'ovni a trois roues et je reprends la route. Paysages sublimes, vertigineux. Deux rapaces en contrebas de la route se laissent porter par le vent, s'élèvent rapidement sans un battement d'ailes et déjà survolent la route. Je me suis arrêté pour les admirer, mon expérience de presque sortie de route au Kazakhstan n'est pas a répéter dans ces lieux à-pics. Malinovka est trop chargé pour plané correctement!
La route plonge dans une vallée tracée par une petite rivière. Une heure et huit cent mètres plus bas, à l'entrée du village de Karakol (depuis le Kirghistan, les Karakol sont nombreux!), un panneau indique un site historique. Direction le site de Uch Enmek par une petite piste (On comprend vite que la langue locale n'a pas d'origines slaves). Traversée d'une rivière paresseuse qui se délasse dans la prairie en traçant des S. Une dizaine de chevaux s'abreuvent, un paysage paisible et bucolique. Et de retrouver un Balbals turc et d'autres stèles tournées vers l'est. Uch Enmek est à l'origine le nom de la montagne sacrée qui a fait de toute la vallée de Karakol une zone privilégiée et protégée depuis des millénaires. Le chamanisme est omni-présent. Située au centre de l'Altaï, au centre de l'Asie Centrale, cette région serait le nombril du monde. C'est vrai qu'une énergie particulière irradie du corridor que forment les montagnes qui entourent ces lieux. Ces stèles verticales, posées comme des menhirs, sculptées de formes humaines ou simplement habillées de lichens gris et dorés se nomment en altaïque « mengir » !
Un panneau invite à poursuivre cette piste vers d'autres vestiges du passé mais je me résigne à poursuivre ma route et avancer encore un peu avant de bivouaquer.
Cette belle route est l'axe principal qui relie Novosibirsk à Tachanta, porte de la Mongolie, ce qui explique la « bonne » qualité de son revêtement. Dans l'Altaï son trajet franchit 34 cols, elle a été classée une des dix plus belles routes du monde par le National Géographic. C'est une sorte de N7 de Sibérie. Sur les cartes récentes elle est nommée P256. Il y a encore peu, elle s'appelait M52, n'est-ce pas plus poétique !
Russie, quelle infinité d'espace brillante et merveilleuse dont le monde ne sait rien. Nicolas Gogol 1842
Vallée de Karakol
Mengir
Cette belle vallée semble en effet particulière. Quelle beauté, quelle paix !
Des images pleines de vie !
Je ne pensais pas l'Altaï si vaste et si hétéroclite !
Je note au fond de mon cerveau la route P256 au cas où je me réincarne en sidecariste...car ce type de route me manque. Cette route ressemble un peu à celle qui relie Moscou à St Pet mais en plus grand et en plus sauvage. C'est quasi le même nombre de kilomètres...
Tu as dû te sentir gravement dépaysé...j'imagine les pleins d'essence aux stations, les rencontres avec la population, l'immensité des paysages et tout ce qu'il est impossible de décrire comme l'immensité de la solitude - un vrai mètre à ruban capable de mesurer Dieu à notre échelle quel bonheur ! Le fait que tu vives maintenant près du Baïkal ne m'étonne plus, après une telle claque ! Il est certain que de te voir retourner à la poste chez toi en France devenait certainement une image très sombre...
Tu as un dossier photo de cela ? Pourquoi ne pas penser à une petite parution, si tu le veux et lorsque tu auras le temps ?
Lorsque tu es parti je ne pensais pas que tu irais jusque là. Et si j'avais eu cette vision, j'aurais préparé ta machine différemment...